"Salvini attaque Di Maio : Il a tort, Atlantia assure des milliers d’emplois."
28/06/2019
Italie. Revue de presse.
Les divergences au sein du gouvernement font les gros titres des médias transalpins. La presse évoque notamment le dernier bras de fer entre L. Di Maio et M. Salvini, sur l’opportunité de la pérennité du groupe Atlantia au sein de la société Autostrade : « Ilva et Atlantia, affrontement entre Di Maio et les grandes entreprises » (Corriere della Sera), « Salvini attaque Di Maio : Il a tort, Atlantia assure des milliers d’emplois » (La Stampa), « Di Maio attaque Atlantia : nuisible pour Alitalia » (Sole 24 ore), « Autostrade, la guerre de Di Maio » (Il Messaggero).
Journaux télévisés : la démolition du pont Morandi, le navire Sea Watch et la polémique sur le groupe Atlantia dominent les gros titres.
Réseaux sociaux : La tendance la plus suivie est #PonteMorandi avec #genovanelcuore (sur la démolition du Pont Morandi de Gênes).
ENTRETIEN de Matteo Salvini, Leader de la Ligue, Vice-président du Conseil et Ministre de l’Intérieur La Stampa, « Autostrade garantit des milliers d’emplois, évitons les préjugés » : «Salvini ne se prive pas de lancer une pique contre son allié Di Maio ‘’je ne fais pas le juge ou l’avocat. L’aspect légal est une chose, mais dire qu’une entreprise est vouée à la faillite en mettant les employés en danger, c’en est une autre. Avant de dire cela, il faut faire bien attention’’. Puis, sur le sort de la compagnie aérienne, il assure ‘’je ne fais pas le rapprochement entre le destin d’Autostrade et celui d’Alitalia ou d’autres sociétés publiques. Je lisais que Di Battista soupçonne un lien entre la famille Benetton et la Ligue : je ne connais pas les Benetton et nous n’avons jamais été amis. Quant à l’affaire du Sea Watch, Salvini revient sur ses propos ‘’c’est un navire qui est hors la loi, qui a violé plusieurs fois les lois italiennes et européennes. Je m’attends à ce que quelqu’un soit emprisonné. L’absence du gouvernement hollandais et de l’Europe est une honte’’ ».
COMMENTAIRE Sole 24 Ore L. Palmerini « TAV, Ilva, salaires : les compromis impossibles pour la Ligue » : « Sur les matchs économiques du gouvernement, il y a un contrôle des électorats respectifs sur lesquels Salvini et Di Maio ne peuvent pas se permettre de lâcher. Et c’est le leader de la Ligue qui a plus de peur de perdre en restant au gouvernement. Si pour le M5S, l’objectif primaire est d’éviter les élections anticipées, pour la Ligue la priorité est de ne pas répéter l’erreur de son allié qui, en moins d’un an, est passé de premier parti à troisième parti. Cela prouve l’extrême volatilité de l’électorat. D’où la volonté de la part des hommes de la Ligue de ne pas trop céder en termes de compromis. Du coup, Salvini continuera à interférer afin de ne pas perdre le consensus qu’il a jusque-là accumulé ».
ARTICLE, Corriere della Sera, Fiorenza Sarzanini : « Salvini: “nous ne serons pas la plateforme de l’Europe”. Le Viminal (Intérieur), déclenche le processus de saisie du navire. » : « Le débarquement des migrants évoqué par Salvini, est conditionné à une redistribution immédiate des migrants au sein des pays européens, sans aucune assignation sur le territoire italien. Salvini est dans l’attente d’une réponse de Bruxelles. La Hollande a refusé, tandis que la France et l’Espagne auraient manifesté leur disponibilité, à l’image d’autres gouvernements. Le décret sécurité récemment approuvé renforce les prérogatives de l’Etat italien, et donne la possibilité au préfet d’Agrigente de se saisir du navire en cas d’entrée illégale dans les eaux territoriales italiennes, ce qui est le cas du Sea Watch. Le débarquement des migrants et leur transfert vers les structures d’identification sont prévus en cas de saisie du navire. »
EDITORIAL Il Messaggero, C. Nordio « C’est vol de souveraineté, l’Italie doit se faire respecter » : « Le problème juridique du Sea Watch, mouillant devant nos côtes, a été résolu par la Cour européenne des droits de l’Homme : l’Italie doit prêter assistance aux migrants mais elle n’a pas le devoir de les accueillir, ni le bateau, ni eux. Bien qu’il ait la loi de son côté, Salvini a eu le tort de se lancer dans des polémiques tonitruantes quand il aurait dû revêtir l’habit sévère des institutions pour faire appel à une Europe inerte. Ensuite il faudrait une réaction claire du gouvernement. Vu qu’il s’agit d’une flagrante violation de notre souveraineté, ce problème mine l’honneur et la crédibilité nationale. Troisièmement : l’affaiblissement de la cohésion gouvernementale ces jours derniers est ressortie sur le thème de la lenteur des rapatriements que M. Salvini a reproché. Enfin, la magistrature : il est normal de conclure qu’une affaire si complexe, vu les accointances dévoilées entre politique et magistrats, ne peut être laissé à l’initiative des procureurs de manière individuelle. Le gouvernement et le parlement doivent s’exprimer clairement pour pouvoir se présenter à tête haute face à l’indifférente Europe ».
ARTICLE, Il Fatto Quotidiano, Luca De Carolis : « Le Quirinal est silencieux, le M5S s’aligne : tout est fait pour éviter les urnes. » : « Tout le monde veut éviter le vote, donc Matteo Salvini peut presque tout faire, au moins jusqu’au 20 juillet. La peur d’un vote en septembre fait taire les voix dissonantes, l’hypothèse d’un vote à la rentrée semble donc s’éloigner. Concernant le Sea Watch, les gouvernants italiens restent muets face aux paroles insultantes de Matteo Salvini envers la capitaine. En effet, les priorités du Quirinal sont d’un autre ordre : éviter la procédure, mais également des élections anticipées. Il en est de même pour Conte, qui « ne pense qu’à la procédure. » Les migrants en revanche regardent le ministre de l’Intérieur. Di Maio, affaiblit par les récents scrutins, doit s’occuper des autonomies, une blessure pour le Sud qui se sent lésé par ces mesures, et qui est son dernier bassin électoral. Concernant la TAV, Di Maio envoie la balle dans le camp de Conte : « Nous verrons le résultat des négociations entre Conte et la France, les avis émis sont révocables, j’espère qu’une solution sera trouvée rapidement. » Enfin, Di Maio répète à ses ministres et collaborateurs qu’il faut « surmonter le 20 juillet » : en effet, il sait qu’un vote en septembre lui serait fatal. Le Mouvement a besoin de temps pour soigner ses blessures, et se restructurer. Même Di Battista, son grand rival revenu sur le devant de la scène, qui a par ailleurs exprimé son soutien aux migrants : « je les ferais débarquer », ne souhaite pas de vote anticipé : « je crains que Salvini souhaite une crise, mais ce ne serait pas dans l’intérêt du pays. » »
EDITORIAL La Repubblica E. Mauro « La loi supérieure » : « Ce serait une erreur de croire que l’affaire du Sea Watch est une question exclusivement politique, car en réalité elle mesure le sentiment de l’opinion publique. Nous sommes tous concernés. L’affaire a coupé en deux le pays. D’un côté il y a une vision d’urgence sécuritaire proposée par Salvini (et avec laquelle une bonne partie des Italiens est d’accord) et celle de la Capitaine du navire qui a répondu à une obligation qu’elle considère suprême : sauver des vies humaines, secourir les désespérés, tenter de leur donner un abri. Comme le dit Saviano, la Capitaine Rackete a commis un geste de légalité, car elle a obéi à une loi supérieure à celles invoquées par Salvini, qui en demande l’arrestation. Nous avons peut-être oublié le principe qui alimente notre Constitution : la dignité de la personne. Nous ne sommes pas à la hauteur des lois que nous avons-nous-mêmes écrit ».
ARTICLE La Stampa, M. Ballico et M. Manzin « La Slovénie s’oppose à la barrière ‘’cela va contre l’esprit européen’’ » : « A en croire les ténors de la Ligue, le projet d’une barrière entre l’Italie et la Slovénie serait quelque chose de concret. Même le Préfet de Trieste s’est exprimé ‘’si des indications arrivent dans ce sens, nous nous attèlerons à la tâche. Sur la faisabilité, je ne suis pas en mesure de m’exprimer, à ce stade’’. Or, la Slovénie s’y oppose car son ministre des affaires étrangères a clairement dit ‘’cela tuerait l’esprit même de Schengen, la connectivité européenne, le marché interne’’. La Slovénie est disposée à des contrôles aux frontières, mais pas à du fil barbelé ».
ARTICLE, Il Fatto Quotidiano, F. Sylos Labini : « Au-delà des migrants : les italiens en fuite. » : « Depuis le début de l’année 2019, 2500 migrants sont arrivés sur le sol italien : la spéculation politique et la couverture médiatique sont énormes, dans le but de maintenir l’attention du public sur un problème humainement dramatique, et honteux dans sa gestion, mais somme toute assez marginal. L’immigration couvre l’autre face de la médaille : l’émigration des italiens. Selon l’ISTAT, entre 2013 et 2017, plus de 244 000 italiens de plus de 25 ans ont quitté leur pays, dont de nombreux diplômés (64%). Cette émigration touche encore plus fortement le sud de l’Italie, qui subit également de nombreux départs vers le centre et le nord de la péninsule. Les emplois qualifiés en Italie sont de plus en plus rares, et de nombreux diplômés rencontrent de grosses difficultés à trouver un emploi dans leur domaine. Au contraire, ce sont les emplois précaires, sans instruction nécessaire, qui se développent. Une véritable force de gauche devrait lutter contre ce phénomène, et proposer une alternative au culte de la start-up, et aux politiques centrées sur l’abaissement du coût du travail et des droits des salariés, pour proposer au contraire un Etat entrepreneur, capable de créer des secteurs durables, et de nouveaux marchés. Ce changement s’accompagnerait d’une discussion pour réviser les règles européennes, qui ont anéanties les grandes industries italiennes avec participation publique, et qui ont contribuées à abaisser la qualité, et le coût du travail. Cette précarisation et cet abaissement des droits des travailleurs rendent les personnes plus fragiles, et plus facilement manipulables, à travers une information et une politique qui jouent sur l’émotion. »
ARTICLE, Corriere della Sera, Marco Galluzzo : “Conte travaille sur un accord avec l’UE. Les doutes sur la flat tax. » : « Giuseppe Conte explique que toutes les parties sont disposées à une approche constructive, et est confiant sur le dénouement des négociations. En marge du G20, de nombreuses rencontres bilatérales seront dédiées à la procédure. Tria est également optimiste concernant les discussions avec ses partenaires européens : « il y a les bases pour éviter la procédure. Je suis en contact permanent avec Moscovici ». Concernant les discussions internes, il l’est également : « il y a un accord au sein du gouvernement. » Malgré un certain scepticisme de la part des collaborateurs de Conte concernant la stratégie que souhaite mener Salvini sur la flat tax. »
(Traduction : ambassade de France à Rome)
Les commentaires sont fermés.